.

Pouvoirs et politisation : Hédé et son canton
( 1785 — An II)


ANNEXE 07


    Lettre de l’intendant de Bretagne de Molleville au Baron de Breteuil, Ministre de la Guerre de Louis XVI ( 25 août 1786).(C 392)


    « Il y a dans la petite ville de Hédé un maire en titre d’office qui est un homme fort honête et très enclat de régir et administrer les affaires de la communauté.
    Suivant un arrêt du conseil du 11 juin 1763, les maires et surtout les maires en titres, sont députés nés aux Etats […], que d’un côté, c’est le seul moyen d’engager les citoyens honêtes de chaque ville à accepter la place de maire qui, sans cela, seroit regardée comme une corvée et que, de l’autre, ces officiers [les maires titulaires] étant ordinairement maintenus dans leurs fonctions pendant plusieurs années, sont dans le cas d’assister à plusieurs tenues consécutives et par conséquent, de s’instruire des affaires de la province, au lieu que si les députés étoient choisis arbitrairement par les corps municipaux, l’ordre du tiers se trouverait toujours composé de nouveaux membres qui n’auroient pas la moindre connaissance des affaires de la province.
    Cependant, les règlements qui attribuent la députation aux maires font quelques fois naître de la jalousie parmi les officiers municipaux et comme on scait que les Etats ne veulent point acquiescer à l’arrêt du 11 juin 1763, et qu‘ils font difficulter d’admettre les députés qui paroissent avoir été nommés en vertu de cet arrêt, plutôt que par les suffrages libres de leurs concitoyens, on a quelques fois vu des communautés affecter d’insérer dans la procuration du maire, qu’il avoit été nommé que pour obéir à l’arrêt du Conseil de 1763 et il n’en falloit pas davantage pour déterminer les Etats à refuser d’admettre de pareils députés, ce qui obligeoit les communautés du Roi à interposer leur autorité pour les maintenir dans l’assemblée.
    La communauté, ou plutôt quelques membres de la municipalité de Hédé, viennent de renouveller l’exemple de ce mauvais procédé vis-à-vis du maire.
    La communauté convoquée pour procéder à l’élection d’un député, s’est trouvée composée de 13 membres y compris le maire.
    De ces 13, il y en a 6 qui après avoir inutilement sommé le maire de se retirer sous prétexte qu’il s’agissoit de délibérer sur un objet qui l’intéressoit, ont déclaré l’arrêt du Conseil du 11 juin 1763 imposant à la communauté l’obligation de donner au maire titulaire par préférence au maire électif, nota qu’il n’y a pas de maire électif, la procuration de représenter la communauté aux Etats et de concourir à ce qui y seroit arêtté, et la communauté n’ayant pas la liberté de nommer un autre député, ils ont été d’avis de donner à Mr Hérisson de Lourme maire en titre , la susdite procuration persuadés que le motif de conserver les droits de la communauté le porteroit lui même à faire tout ce que la confiance de laditte communauté (quoique forcée) lui inspirera pour le bien du service [du Roi], et sur l’observation faite par Mr Delourme que l’avis de ces 6 échevins pourroit mettre obstacles à son admission aux Etats, 6 autres échevins ont déclaré lui donné la procuration pure et simple pour y assister. […] Il est évident qu ‘elle est irrégulière et nulle en ce qu’il n’y avoit pas de partage puisque le maire étoit en droit de donner son suffrage et que par conséquent, il y avoit 7 voix contre 6. D’ailleurs, quand même il n’auroit pas pu donner sa voix, le partage ne pouvoit être vuidé qu’en sa faveur, de sorte que les 6 opposans auroient du régulièrement souscrire aux suffrages des autres et donner une procuration pure et simple.[…]
    D’ailleurs, les membres opposans de la communauté de Hédé n’ont pas le plus léger reproche à faire au maire. C’est un homme d’un caractère doux, honête qui a déjà plusieurs fois assisté aux Etats et où il s’est parfaitement bien conduit et si on a cherché cette année à l’éloigner, c’est parce que le Sieur Belletier [a autrefois] été député aux Etats et ne s’y est pas comporté de manière à mériter des éloges.
    Quoiqu’il en soit, la délibération est injurieuse pour le maire, elle est nulle dans la forme, elle est contraire aux règlemens, en conséquence je présume Mr, que vous ne ferés pas difficulté d’en proposer la cassation à sa M[ajesté] […] ».