3 - LE POUVOIR ADMINISTRATIF A HEDE

 

3.2 REGARDS SUR LA VILLE

3.2.1 LES TRAVAUX PUBLICS

 

* La nécessité des travaux

- Constat urbain

Comme nous avons pu le dire à plusieurs reprises, Hédé est une ville largement fréquentée. La ville est coupée par un axe routier principal qui conduit à Rennes, et par deux embranchements, l'un en direction de Saint-Malo et l'autre dirigé vers Dol.
L'habitat se concentre autour de ces routes ; il est dit linéaire. Les commerçants et artisans ont leurs boutiques sur la rue. Si la situation géographique de la ville est un atout commercial, elle l'oblige aussi à faire entretenir régulièrement les voies de circulation. Les incessantes traversées de voyageurs, troupes militaires, marchands forains sont à l'origine de la détérioration des routes. A cela, nous pouvons ajouter l'altération du pavage résultant des conditions climatiques.
Hédé, au XVIII ème siècle prévoit l'exécution de travaux publics afin de refaire les routes. Elle ne peut prendre une telle décision sans l'accord de l'intendant.

 

- L'intervention de l'intendant

Le XVIII ème siècle est, à juste titre, considéré comme le siècle de l'intendance. L'intendant réside à Rennes ; il est le représentant de l'autorité royale dans la province de Bretagne. Il a des agents sous ses ordres afin de lui rendre compte de ce qui se passe dans la sénéchaussée. Les villes doivent faire intervenir l'intendant pour ce qui concernent les finances ou les travaux publics. L'intendant détache un ingénieur des Ponts et Chaussée dans la ville, pour examiner le projet et rédiger un devis. Si le projet convient, le contrôleur des finances paie le miseur de la ville pour qu'il s'acquitte du montant des réparations. Le contrôleur doit surveiller l'évolution des travaux afin que le devis de l'ingénieur soit respecté. L'intendant ne prend en charge que les travaux, c'est-à-dire la construction ou la remise en état des bâtiments. Par la suite, la ville doit entretenir l'ouvrage elle-me me.

Certains travaux, décidés par l'intendant, sont plus ou moins bien acceptés par la communauté.
Nous allons considérer les travaux effectués sur la montagne et leurs conséquences sur les conditions urbaines de Hédé.

 

* L'exécution des ordres

- Les travaux sur la montagne

Hédé est située sur une colline de 100 mètres de hauteur. Les travaux sur la montagne se référent aux transformations effectuées au nord de la ville, vers les ruines du château.
Nous apprenons qu'un devis a été rédigé au sujet du nivellement de la montagne. Or, une lettre datée de juillet 1777 rend compte du désaccord de la ville qui n'a pas reçue le devis pour les travaux. En effet, les travaux ont endommagé la route d'accès au champ de foire et celle conduisant à l'hôtel de ville :

"l'abaissement de la rue qui forme le chemin de saint-Malo rend l'entrée de l'hôtel de ville sinon impossible au moins de la dernière difficulté et très périlleuse " (94).


La jonction entre la rue de Saint-Malo et celle de Dol est difficile compte tenu de la dénivellation entre ces deux routes. L'auberge de l'Écu, située sur la rue du Four est inaccessible. Elle perd de son prestige par

" l'impossibilité où étaient les voitures et les voyageurs à pieds et à cheval d'y arriver par le chemin ordinaire " (95).

Les conséquences de la voirie sont importantes. Les travaux ont, en plus, engendré un tarissement des sources situées sur les hauteurs de la ville. A présent, les habitants doivent se rendre en bas du vallon pour aller chercher de l'eau. Le problème de l'approvisionnement en eau soulevé par les travaux, conduit la communauté à réclamer la construction de fontaines.
Outre ce problème, la ville porte plainte car le devis lui a été caché.

Elle : " souffre de l'exécution d'un plan qu'elle a d'autant moins pu empêcher qu'il ne lui a pas été communiqué " (96).

 

La ville demande à l'intendant de :

- Refaire une route pour se rendre au champ de foire.

- Rétablir les communications entre les routes de Saint-Malo et Dol.

- Paver la rue qui mène à l'hôtel de ville.

- Installer une fontaine au nord de la ville.

 

Nous allons étudier quels ont été les transformations effectuées pour soulager la ville des dégâts qu'elle a subit. Cette analyse englobe l'ensemble des travaux ayant rapport à la voirie, même ceux qui précédent 1777.

 

- La voirie


En 1762, les pavés de la ville sont totalement détériorés par le passage des voitures. L'ingénieur des Ponts et chaussées, le sieur Chocat, écrit le 26 octobre un procès verbal sur le mauvais état des pavés et de la traversées de Hédé. La ville doit effectuer des travaux en suivant les clauses du devis. Ce dernier doit être exécuter sous trois mois après le début de l'ouvrage. Le nouveau pavage est garantie pour deux ans et demi. Il a un coût de revient s'élevant à 928 livres.

Le 18 avril 1762, un marché est conclu entre le sénéchal Morel, le procureur du roi Delamarre, le sub-délégué Ruaulx de la Tribonnière et l'entrepreneur Pierre Lavallée. Les travaux se divisent en trois parties, les payements aussi. L'entrepreneur reçoit 328 livres à l'ouverture des travaux, 200 livres à la moitié, 200 livres à la fin de l'ouvrage et encore 200 livres à la fin de la garantie. A compter du 18 avril, Pierre Lavallée les travaux commencent. Le 28 mai, la communauté annonce à l'ingénieur qu'il a déjà " fait plus de la moitié de l'ouvrage mentionné au marché ". Il conclut son contrat dans les temps, puisqu'il a " parachevé dès le 16 juin 1762, aux fins du marché fait avec lui le 18 avril ".

Les délibérations communales ne font plus allusion aux problèmes de voirie pendant plusieurs années. La question resurgit quelques temps après les dommages occasionnés par les travaux sur la montagne. Les plaintes n'ont pas un écho immédiat. Il faut attendre les années quatre-vingt pour que de nouveaux travaux de voirie débutent.
La première préoccupation de l'intendant Bertrand de Molleville concerne l'état du pavage de la banlieue de Hédé. On entend par banlieue, les quartiers situés autour du centre ville, Comme le quartier des Forges, au sud de la ville. L'intendant charge, en 1784, l'ingénieur Piou de lui faire un compte rendu de la situation de la ville et, s'il en est besoin, de rédiger un devis : " tant pour les réparations des traversées des grandes routes de Rennes, Dol et Saint-Malo que pour repaver à neuf les rues du prieuré, de l'abbaye et celle qui conduit au château et pour raccordre les anciens pavés de la place et de Grande Rue avec les nouveaux "(97). L'ingénieur estime l'ouvrage à 1254 livres 18 sols et 6 deniers. La ville demande une aide financière aux Etats de Bretagne. Les Etats destinent à Hédé 1000 livres qui appartiennent " à une somme de deux cent mille livres pour la réparation des pavés et banlieues des villes de Bretagne qui se trouvent traversées par de grandes rues " (98). La somme concédée par les Etats est importante, mais ne suffit pas à payer l'ensemble des travaux de voirie. La communauté demande à l'intendant d'intercéder auprès du Parlement, afin que les députés honorent la totalité de la dette de la ville.
Les travaux sur la montagne ont endommagés les rues qui permettaient l'accés au champ de foire. Une nouvelle rue est aménagée en 1787. La dépense est à la charge de la ville car l'intendant ne pense pas que les travaux soient indispensables.
Il n'en est pas de même pour les pavés de la Grande Rue. L'état du pavage est médiocre : la chaussée est cabossée et de niveaux différents. Cette rue est, sans aucun doute, la plus fréquentée de la ville. Les travaux apparaissent d'intérêt public. C'est la raison pour laquelle, ils sont pris en charge par l'intendant. L'ingénieur Piou dresse un devis. L'ouvrage est réalisé les mois suivants.

Le problème du pavage réapparaît régulièrement dans les lettres destinées à l'intendance. En effet, les nouveaux pavés s'abîment rapidement, et la communauté demande souvent l'examen de la situation par l'ingénieur des Ponts et Chaussées.
Malgré toutes les réclamations de la ville, seul l'intendant est habilité à autoriser l'ouverture de travaux. La communauté porte un grand intérêt à l'embellissement de sa ville. Elle s 'intéresse, par dessus tout, a l'entretien de son horloge et aux travaux nécessaires dans le quartier de l'hôtel de ville. Le conseil se préoccupe également, du problème de l'eau. L'aménagement de fontaines a un caractère fonctionnel mais se veut aussi, être une oeuvre agréable.

 

 

3.2.2 LES TRANSFORMATIONS URBAINES

* Les travaux au centre ville

 

Avant de préciser la question, il est nécessaire de situer géographiquement le lieu où les travaux s'effectuent. L'ouvrage concerne la démolition des bâtiments juxtaposés à la halle. Ils sont tous regroupés sur la place centrale de la ville. Il s'agit de l'hôtel de ville, de la prison et de l'auditoire qui vivaient en sursis depuis la destruction de la halle. L'horloge, située au dessus de l'auditoire, est de ce fait au centre des préoccupations de la communauté.

 

- Hôtel de ville, prison et auditoire

La destruction des halles incitent l'intendant à se débarrasser des autres bâtiments qui lui sont accolés. Le désir de l'intendant trouve son fondement dans l'insalubrité des locaux subsistants, et dans l'insécurité qui les caractérisent. Chacun d'eux risquent de s'écrouler : les murs en mortier ont mal résistés au temps. Les halles servaient du support aux autres bâtiments. Sa démolition met en péril tout l'édifice.
La communauté est la première à réclamer l'aide de l'intendant pour trouver une solution. En 1783, l'état précaire de l'hôtel de ville alarme la ville. Elle demande à l'ingénieur Piou de dresser un plan et un devis pour la construction d'un petit hôtel de ville qui réunirait le corps de garde, la salle de réunion, un cabinet d'archives et un dôme pour l'horloge (99). L'intervention à Hédé de l'ingénieur relève de la propre initiative de la communauté. L'intendant ne semble pas favorable à une telle entreprise. Il comprend la nécessité d'un déménagement mais refuse que la ville se lance dans la construction d'un nouvel édifice. En contre partie, il autorise la ville, en 1784, à rechercher un logement pouvant servir d'hôtel de ville. Messieurs Delourme et Deslandes ont été chargés par la communauté de chercher ce logement. Le 30 avril 1784, nous apprenons que le sieur Aubrée consent à louer une petite ferme à la ville. L'intendant semble avoir accepté la location, puisque nous savons qu'en 1785 les archives ont été transférées dans la nouvelle salle de réunion de la ville. L'intendant fait payer par le miseur le loyer.

La ville de Hédé ne possède plus d'hôtel de ville. Le système locatif ne résout pas le problème. La ville doit attendre le XIX. siècle pour obtenir une véritable mairie, qui s'installe face à la place du marché.
Le même problème se pose pour la prison, qui subit aussi les conséquences de la disparition de la halle. Le local carcéral est délabré. Le sieur Leroux, entrepreneur de l'escarpement de la montagne, demande la destruction de la prison. Il est vrai qu'en 1776, la prison n'accueille déjà plus personne. L'intendant autorise la démolition des murs de la prison " vu leur état avancé de vétusté ". Le miseur de la ville demande 100 livres à l'intendant pour cet ouvrage. Le 22 août 1777, la communauté approuve la décision de démolir ce qui reste de la prison, exception faite des murs qui retiennent encore l'auditoire. Les travaux sont dirigés par messieurs Thébault, Miniac et Brénard. Ces derniers estiment les travaux pour 135 livres, soit 35 livres de plus que le devis de l'ingénieur. Les commissaires des finances qui inspectent les travaux promettent de " faire payer par monsieur le miseur de cette communauté, la somme de cent trente cinq livres aux dits Thébault, Miniac et Brénard en deux payements (100). Les travaux doivent débuter à la Saint- Michel de l'année 1777 (mois de septembre), et finir à la Saint-Michel de l'année suivante.
La prison est détruite. La ville en réclame une autre en vain. Sur la place centrale de Hédé ne subsistent que l'auditoire et l'horloge.
L'auditoire sert de lieu de réunion à la communauté. L'édifice est au centre de l'activité politique de la ville. A ce titre, au lendemain de la démolition de la halle, le roi de France demande la consolidation des murs de l'auditoire et du clocher, qui abrite l'horloge. Les réparations à effectuer sur l'auditoire sont à exécuter par l'adjudicataire de la halle, monsieur Duvivier Huet. Le propriétaire fait intervenir l'entrepreneur Lavallée pour diriger les travaux, en 1752. L'auditoire est restauré, mais en 1789, il est à nouveau délabré. La fragilité de l'auditoire met en péril la stabilité de l'horloge. La communauté est obligée de déménager l'horloge du clocher de l'auditoire à celui du couvent des Urselines. Reste le problème de l'édifice à examiner. En 1789, tous les bâtiments annexes des halles ont été détruits. L'auditoire n'a pas de raison d'échapper à ce sort. Il est démolit cette même année. "

Hédé n'a sauvegardé que son horloge mécanique dont l'entretien lui coûte cher.

 

 

* L'horloge


De nombreuses délibérations communales portent sur les réparations à faire à l'horloge. En 1749, la communauté délibère sur " les réparations nécessaires et urgentes de l'horloge de la ville de Hédé " (101). Les mêmes réclamations jalonnent le XVIII ème siècle. Ainsi en 1758, la communauté interroge l'intendant afin "d'être autorisée à faire cette dépense de faire raccommoder l'horloge " (102). Une requête similaire est faite en 1762. Les années suivantes, la communauté associe, dans ses lettres à l'intendant, la dégradation progressive du clocher et la crainte de voir tomber l'horloge. il apparaît que le clocher est dans un état de délabrement avancé. La description qui en est donnée par le conseil confirme cette impression: le clocher étant composé de quatre faibles poteaux aux pièces de bois très mal assemblées, et formant une cage dans laquelle l'horloge est placée ; ces pièces sont couronnées par un petit chapiteau dans lequel servant de timbre l'horloge est suspendue "(103). L'aspect général de l'édifice paraît, en effet, peu fiable. C'est la raison pour laquelle le 10 septembre de cette année, la communauté adresse une lettre à l'intendant afin qu'il convienne de l'urgence des réparations à apporter à l'édifice qui soutient l'horloge : " le sujet de la délibération de ce jour est à l'occasion du clocher placé sur l'auditoire et qui appartient à la communauté de Hédé, lequel clocher est tombé en vétusté [...] la communauté peut, en amendant le devis du sieur Dorotte, faire étayer le clocher, démonter l'horloge, la transporter en lieu sur et la tenir en état" (104). L'intendant autorise la communauté à entreprendre des travaux sur le clocher et l'horloge, car le devis du sieur Dorotte en a montré la nécessité.
L'horloge a besoin, régulièrement, de réglages et de réparations. C'est le cas en 1781, lorsque la communauté demande une nouvelle fois le droit d'effectuer des réparations. L'intendant fait intervenir un horloger de Rennes pour dresser un devis estimatif. Le sieur Saint-Jean, horloger, rédige le devis et les travaux se déroulent pendant le mois de novembre. L'intendant doit se charger du payement de l'ouvrage, or le miseur de la communauté n'a reçu aucun ordre à ce sujet. Le conseil intervient pour que soit payé " au dit François Morice une somme de soixante quatre livres restantes de celles de cent livres, prix principal de l'entreprise qu'il avait faite des réparations de l'horloge de cette ville, d'après le devis estimatif qui avait été dressé par le sieur saint-Jean "(105).
Les réparations sont éphémères. En 1783, la ville est, à nouveau, à la recherche d'un entrepreneur capable de réparer l'horloge. Il le trouve en la personne du sieur Huchet, qui demande 100 livres pour ce travail. L'intendant autorise le miseur à lui verser cette somme.
Ces réparations sont les dernières effectuées avant 1789. A cette date, la communauté décide de déplacer l'horloge jusqu'au couvent des Urselines.

Un dernier point reste à éclairer avant de conclure ce mémoire. Nous avons débuter notre analyse par l'étude de la population et des problèmes qu'elle connaissait au XVIII. siècle. Le manque d'eau était l'un d'entre eux. Il est donc logique de terminer ce tableau de Hédé, par l'examen des méthodes employées par la ville afin de résorber ce fléau.

 

* Des constructions utilitaires : les fontaines

Le problème de l'approvisionnement en eau est largement débattu par la municipalité. Deux périodes, où le sujet est plus amère pour la ville, apparaissent au moment des épidémies des années soixante ainsi que pendant la grande sécheresse de 1785.
La communauté demande le droit de construire de nouvelles fontaines. En effet, Hédé possédait déjà des fontaines. Nous savons qu'il en existait une nommée la fontaine de Grignon, au carrefour des Quatre-Croix, depuis le XV ème siècle. Outre les fontaines, Hédé comptait au moins trois puits avant le XVIII. siècle : le premier construit au XVI. siècle sur la place du Parquet, le second abrité sous la halle et le dernier à proximité de l'abbaye.
A notre période, les puits et fontaines semblent contenir plus de boue que d'eau.
Le besoin en eau préoccupe souvent la ville. Des devis pour la construction de fontaines se succèdent. Aucun plan de la ville au XVIII ème siècle ne permet de situer géographiquement l'emplacement de l'ensemble d'entre elles. Nous devons nous référer à un plan du nord de la ville effectué en 1680, ou à un plan général de 1835.

A partir de 1765, les habitants de Hédé souffrent du manque d'eau, à tel point que certains se sont réunis pour sonder le sol. Le problème de Hédé vient de sa position surélevée. La ville est dans l'obligation de drainer l'eau sur le promontoire. La situation est suffisamment alarmante, dans les années soixante, pour que la communauté demande à l'intendant le droit de prélever sur ses octrois, une somme destinée aux fontaines : " [...] pour supplier Monseigneur l'intendant de bien vouloir lui permettre de prendre une somme de trois cent livres sur les mêmes deniers octroyés pour faire construire trois fontaines dans les endroits les plus commodes J...] les plus abondants, entendu qu'on a manqué d'eau pendant quatre mois et qu'on en manque encore actuellement "(106). L'intendant autorise les travaux, et un contrat est signé entre la communauté et l'entrepreneur Pierre Lavallée pour la construction de six fontaines. En effet, l'intendant a demandé que pour la même somme de 300 livres, six fontaines au lieu de trois soient érigées. La ville annonce à l'intendant que Pierre Lavallée : " n'aurait pas pu pour la même somme en faire six qui quoique construites avec moins d'art fussent également solides " (107). Le marché passé avec Pierre Lavallée est rédigé le 5 juillet 1768. Il stipule que le payement de l'ouvrage sera répartit en trois fois 100 livres avant le commencement des travaux, 100 livres à la moitié de l'ouvrage et 100 livres à la fin.
Le devis décrit les fontaines. Elles répondent tous au même plan :

les murs sont constitués de mortier (sable et chaux) et de pierres. La marselle a deux et demi pieds de large. A l'est, il y a un mur d'appui pour soutenir les terres supérieures. Les trois autres murs sont élevés à hauteur d'appui mais recouverts de tablettes de pierre de taille de quinze pouces de large. Le bassin de la fontaine est carré avec cinq pieds de profondeur et six pieds de largeur. Autour du bassin, il y a la possibilité de contre murs pour fixer l'eau dans le bassin et réunir les sources voisines. L'intérieur du bassin est constitué de pierres en saillie pour pouvoir s'approcher de l'eau, même basse. Un petit chemin de cailloux est construit pour accéder facilement à la fontaine (108).
La fontaine de la Forge répond à ce schéma. Elle se situe à côté du Moulin du Breil Marin. C'est aussi le cas de la fontaine de Pigeon qu'il nous a été impossible de situer sur un plan. La troisième fontaine construite est celle dite de Célésier, située dans des jardins proches de la Grande Rue.
Le travail de Pierre Lavallée concerne aussi l'entretien de vieilles fontaines, comme celle de Drouet, juxtaposée au Moulin Neuf. Un bassin pour recevoir l'eau est aménagé à côté de la fontaine pour en faciliter l'accès, ainsi qu'un chemin qui permet de s'y rendre plus facilement. De même, le devant de la fontaine du Prieuré est ravalé avec du mortier et des pierres ; on retire les broussailles afin que le bassin ne se bouche pas.

Le coût de revient faible de l'entreprise laisse présager un avenir incertain pour ces trois fontaines. En effet, les années quatre-vingt réveillent le problème de l'approvisionnement en eau. A croire que les fontaines construites en 1768 sont déjà hors d'usage. En 1784, l'ingénieur Piou est chargé de dresser un devis estimatif pour la construction d'une fontaine supplémentaire. La nouvelle fontaine doit être érigée au sud du Bas-Manoir, c'est-à-dire "au côté oriental du nouveau chemin de Hédé a Saint-Malo, entre le jardin dépendant de l'auberge de l'Écu et la cour de la maison de Broc de la Tuvellière " (109). La ville doit trouver un moyen pour drainer l'eau jusqu'à la fontaine. l'ingénieur propose de creuser un canal étroit composé de deux petits murs recouverts de pierres plates et de mortier. Les travaux nécessitent l'escarpement du rocher entre le jardin et l'auberge de l'Ecu, et de percer le côté occidental de la fontaine afin de créer une ouverture pour évacuer le trop plein d'eau. En 1785, Piou estime l'ouvrage à 2523 livres et quelques deniers. La communauté n'est pas satisfaite de cette proposition. Elle s'adresse directement à l'intendant afin que l'ingénieur révise son devis: " il a été présenté par monsieur le maire que le sieur Piou, ayant fait passer à la communauté de Hédé des plans et un devis de fontaine dont la dépense aurait excédée 2500 livres, et la communauté par les différentes considérations ayant porté ces plans et devis à Monseigneur l'intendant et a le prier d'ordonner au sieur Piou de faire de nouveaux plans de fontaines dont l'exécution n'aurait pas excédé 600 livres " (110). L'intendant intercède en la faveur de la communauté de ville. Il demande à l'ingénieur d'émettre un devis en rapport avec les possibilités financières de Hédé. Le sieur Pîou soumet au conseil municipal un nouveau devis qui s'élève à 1152 livres. Le prix reste, tout de même, très important. La ville lance les travaux mais en 1787, elle est insatisfaite des résultats. L'entrepreneur, le sieur Chevallier, n'a pas scrupuleusement respecté le devis. Ainsi, le petit canal est tellement étroit que les sources voisines ne peuvent s y écouler. Le treuil, pour soulever les seaux, est imparfait et, les routes qui entourent la fontaine n'est pas pavée. La communauté demande que le sieur Piou rédige un autre devis pour des réparations.
Les mauvaises conditions climatiques, la disette qui s'installe doucement dans la ville font craindre à la communauté un besoin accru en eau. C'est dans ce contexte qu'elle implore l'intendant de presser les réparations avant l'arrivée de l'été. La fontaine est améliorée au début de la saison estivale de 1787.

La communauté de ville s'est intéressée, pendant toute notre période,. au problème de l'eau. Elle tente de donner une image moins austère à cette masse rocheuse, de la rendre plus vivable. L'installation de fontaines apparaît comme une victoire sur l'élément physique.

L'analyse met en avant le poids disproportionné de la communauté des nobles bourgeois et habitants de la ville, sur tous les autres pouvoirs présents à Hédé. Les représentants royaux et municipaux constituent ensemble le vrai pouvoir, celui du conseil de la ville.

 

 

 

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