La position devenait difficile pour le duc qui ne voulait plus mécontenter ses sujets et qui n'osait pourtant renvoyer brusquement les soldats qu'il avait toujours trouvé prêt à son appel, qui avaient encore dans le pays une grande influence, et qui enin, pouvaient lui faire autant de mal qu'ils lui avaient autrefois rendu de services. Il essaya de traiter l'affaire en longueur et de gagner du temps, espérant que lassés d'attendre et ennuyés de n'être pas employés , les Anglais finiraient par se réembarquer; mais cela ne faisait pas le compte du roi Richard qui avait envoyé ses troupes surtout pour servir à arracher la Bretagne et son duc à l'influence française.
Jean IV s'aperçut bien vite de son erreur, et après avoir par tous les moyens et pendant le plus longtemps possible évité de se rencontrer avec ses alliés, devant la menace qu'on lui fit et qu'on exécuta en partie d'aller le chercher avec une armée à Vannes où il se tenait, il dut décider et se vit obligé de convenir d'un rendez-vous avec le comte de Buckingham, et bon gré malgré, de se mettre en route pour s'y rendre.

Ce furent ces événements qui procurèrent à Hédé l'honneur qu'elle n'avait pas eu depuis la mort de Blanche de Champagne, de recevoir son souverain. Le comte de Buckingham, las d'attendre à Rennes le duc qui ne venait pas, lui avait envoyé trois chevaliers anglais, Messires Robert Knolles, Thomas Percy, Thomas Trivet, à la tête d'une véritable armée. Force fut à Jean IV de s'incliner, et il partit enfin de Vannes avec environs 60 lances vers le mois d'octobre 1380.
Pendant ce temps, Buckingham avait quitté la paroisse de Saint Sulpice, près de Rennes, où il était logé, pour aller rejoindre son armée cantonnée à Combourg, avec laquelle il passa trois jours ; puis quand il sut que le duc ne le trouvant pas à Rennes avait continué sa route sans s'y arrêter et devait coucher à la Mézière, il avait à son tour mis sa troupe en marche et arrivait à Hédé où il prit ses logements, sans vouloir aller plus loin.
Dès le lendemain Jean IV ayant laissé ses soldats à la Mézière, fit son entrée accompagné du seigneur de Montboucher, de Messire Etienne Gouyon, Guillaume Taneguy, Eustache de la Houssaye, et Geoffroy de Kerinel, ses conseillers.

L' entrevue avec le général anglais fut des plus courtoises ( Chroniques de Jean Froissart ), Jean IV s'excusa de son retard, sur les difficultés qu'il éprouva dans tout le pays ; il en rejeta la faute sur les rebelles et ses propres sujets qui n'étaient plus disposés à exécuter ce qu'ils avaient promis au commencement de l'été. À cela le comte s'empressa de répondre : " Beau-frère de Bretagne, si pour ce ne demeurera-t-il mie, si vous voulez que nous corrigions les rebelles ; car avec l'aide et la puissance que vous avez et que nous avons et qui tous les jours nous peut venir d'Angleterre, nous soumettrons ci vos sujets qu'ils seront tout aise quand ils pourront venir à merci. ( Chroniques de Jean Froissart )

Le duc compris, et comme c'était cette intention qu'il redoutait par dessus tout, il n'insista pas sur ce sujet. On s'entretint longtemps, encore de diverses choses, puis chacun rejoignit son hôtel et ses gens. Le lendemain le duc Jean IV et le comte de Buckingham firent une joyeuse chevauchée, puis après le dîner s'occupèrent très longuement de leurs affaires. Jean comprenant que les Anglais qu'il avait appelé, était maintenant pour lui plus un obstacle qu'un secours pour la conquête de son duché, et n'osant cependant pas manquer ouvertement aux promesses qu'il leur avait faites, ne voulu prendre immédiatement et à lui seul une décision dont il aurait toute la responsabilité. Il fut convenu alors que le duc retournerait à Rennes avec ses conseillers et ceux du comte anglais, et que tous réunis décideraient enfin d'une façon définitive, ce qu'il y aurait de mieux à faire.

Jean IV quitta Hédé avec ses conseillers et le seigneur de Latimer, Messire Robert Knolles, Messire Thomas Percy, et Messire Thomas Trivet qui ne l'avaient point quitté depuis qu'ils avaient été le chercher à Vannes. Il retrouva à la Mézière ses soldats qui l'attendaient et son logement. Il Y passa la nuit, et le matin suivant repris le chemin de Rennes où devaient le rejoindre les conseillers anglais. Le comte de Buckinham qui l'avait accompagné une partie du chemin, rentra reprendre le soir ses quartiers à Hédé, où il attendit avec impatience qu'on lui envoya des nouvelles.

La discussion fut longue à Rennes au sein du conseil. Ce ne fut qu'au bout de trois jours qu'une décision intervint. Il fut convenu que Jean marcherait avec l'armée anglaise mettre le siège devant Nantes et s'en irait lorsque la ville serait prise. Cela fut juré sur les Saintes Ecritures. Le duc fut obligé de céder, mais il se réservait de mettre tant de mauvais vouloir dans l'aide qu'il devait apporter aux Anglais et tant d'entraves à leurs opérations qu'il finirait bien par se dégoûter et quitter la Bretagne.
Le quatrième jour on fit prévenir de cette convention le comte de Buckingham qui abandonna immédiatement Hédé avec toute son armée et alla se loger aux environs de Rennes, en attendant l'heure du départ pour Nantes. On sait qu'après deux mois et demi, les Anglais que n'avait pas rejoint Jean IV, malgré sa promesse, durent lever le siège.
Dans les dernières années de sa vie, le pays était redevenu plus tranquille, Jean IV pensa à réparer les désastres des années précédentes. " En 1399, il s'occupait de relever les terres et les courtines ruinées pendant la guerre dont la Bretagne venait d'être le théâtre. " ( La Bretagne contemporaine sous la direction de Mr Aurélien de Courson, Hédé.)
De son voyage à Hédé, il avait eu le temps d'examiner l'état de délabrement du château et de reconnaître que d'importantes réparations et des améliorations y étaient nécessaires.

Si les dégâts occasionnés aux ouvrages de défense n'avaient été que l'oeuvre du temps, l'argent du trésor ducal aurait sans doute suffit pour y porter remède, mais le besoin qu'eu le duc de faire appel aux finances des seigneurs voisins, montre quelle en était la gravité, qu'ils n'avaient pu être produits que par des faits de guerre inconnus de nous, des causes que nous ne pouvons préciser, et qu'ils étaient, comme nous l'avons dit plus haut, le résultat des luttes et des combats qui se livrèrent autour de Montmuran et de Bécherel. S'il faut encore ajouter une preuve des désastres et des dommages qu'eurent à subir les habitants, à la suite des pillages et des désordres de tourtes natures de cette période néfaste, nous la trouvons dans ce fait qu'ayant imposé autrefois à ses sujets un droit sur les marchandises et un fouage d'un écu d'or par feu, et d'autres encore plus tard, Jean IV en affranchit ceux de Hédé par des lettres que lui et ensuite sa veuve Jeanne de Navarre, pendant les trois années de sa régence accordèrent aux habitants de Hédé pour les exempter de tout impôt. Leur fils lui même, le jeune duc Jean V, alors âgé de quinze ans, venu au commencement de janvier 1404 (1405 n.st) chez Messire Guy de Laval, son grand-oncle et son curateur, vieux, malade et infirme, au château de Montmuran où nous le trouvons, le 13, confirmant par des lettres datées de Tinténiac, les franchises pour les approvisionnements modernes du couvent des Franciscains de Dinan et le lendemain un 14, signant l'acte important qui le rendait majeur et par lequel sur sa propre demande " pour cause de débilité et de feblèce à lui sourvenue" il déclare " sondit oncle deschargé de l'office et charge de curaterie." avait pu dans ce voyage, examiner de près son château de Hédé et constater de ses yeux, l'état misérable auxquels les habitants avaient été réduits à la suite de la guerre de succession.
Aussi s'était-il empressé de suivre l'exemple de son père et de sa mère et de leur confirmer le 7 janvier, toutes les franchises que ceux-ci leur avait accordés précédement. Bien plus, ces lettres n'ayant point eu d'effet par la raison qu'elles n'avaient point été enregistrées par la Chambre des Comptes " pour ce qu'elles avaient disparues dans un incendie avant d'y être présentées." dix-huit mois plus tard le 10 juin 1407, pour les remplacer, il leur en accorde des nouvelles :

" Jehan, duc de Bretaigne, comte de Montfort et de Richemond, à tous ceulx que ces présentes verront . . . Salut. Nous avons cest jourd 'hui receu l'humble requeste . . . de la partie de notz hommes . . . les habitants de Hédé contenant que . . . ayant considération aulx grandz griefs, adversitez et dommaiges qu'ils avoient eu et soubstenu tant par guerre reparations et fortifications envyron lesd villes et chastel dudict Hédé . . . Nous . . . venuz de puerité à nostre âge . . . eussions par noz lectres données du septième jour de l'an qui fut dict mil quatre centz et quatre (1405 n.st) . . . attendu qu'ilz sont paouvres et n'auroient de quoy se pourvoir soustenir en notre dicte ville de Hédé . . . les franchissons, quictons et exemptons de notz fouaiges, subcides, guectz, que aultres subventions ."

( Cette lettre, ainsi que toutes les autres données par les ducs, successeurs de Jean IV, dont il sera question dans la suite sont des copies certifiées faites en 1571 pour servir aux habitants de Bazouges dans un procès qu'ils avaient à soutenir et paraîtront plus tard en appendice.)

 

C'est en cette année 1399, que Jean IV s'adressant à l'Abbesse de Saint-Georges, Julienne du Guesclin, la soeur du connétable, dont la riche abbaye possédait quelques vassaux aux environs de Hédé et beaucoup en Tinténiac, obtint d'elle, par une lettre datée du 5 août, (Archives Départementales de la Loire-Inférieure E 129 ), l'autorisation de lever "pour le rétablissement des murailles du château de Hédé" un subside de vingt sous par feu, sur les hommes et sujets de son abbaye, dans les paroisses de Hédé et de Tinténiac, mais pour trois ans seulement. Jean IV mourut vers la fin de l'année et ce fut probablement Messire Simon d'Espinay, nommé en même temps Capitaine de Hédé et de Dinan, par la duchesse Jeanne de Navarre, sa veuve tutrice de son fils et régente de Bretagne, qui eût la direction des travaux du château.
Quels furent ces travaux ? Il y en eu de deux sortes : les réparations proprement dites d'abord, puis la construction de nouveaux moyens de défense.
Les réparations nous savons qu'elles furent considérables, mais nous en ignorons le détail. Il est probable que l'on fit disparaître ces hourds en bois qui couronnaient le sommet de la tour, exposés à l'incendie, démodés, en mauvais état par suite de vétusté, pour les replacer par des créneaux de pierre en saillie, et des mâchicoulis, comme on en construisait dans le commencement du siècle, formant un abri sûr et permettant d'accabler l'ennemi qui aurait voulu en tenter l'assaut.
Quant aux travaux concernant l'augmentation de la défense, ils furent très importants. Le château tel qu'il avait été construit au XI ème siècle et qu'il existait encore au XIV ème ne se composait absolument comme nous l'avons dit au début que d'une seule tour carrées entourée de trois côtés par un fossé profond, et du quatrième défendu par l'escarpement du rocher sur lequel elle s'élevait. Un autre fossé partant de cette tour et se dirigeant vers le Nord allait rejoindre l'autre bord du plateau le coupant ainsi en deux parties : l'une à l'Est où se trouvait la ville, la seconde à l'Ouest, faisant de la pointe qui dominait la vallée une espèce d'île, servait de bayle intérieur et renfermait les communs. Tel qu'il était, ce bayle présentait de grands inconvénients. Sans aucune muraille, sans aucun moyen de défense que son élévation au dessus de la plaine et la rapidité de la pente du coteau, il suffisait d'un défaut de surveillance, d'une surprise pour qu'il fût envahi, et le château se trouvait en un instant entouré de tous les côtés par des assaillants arrivés jusqu'à son pied.
D'autre part, un engin nouveau apparaissait qui allait changer les conditions de la guerre. Le canon avait été inventé et venait, nous l'avons vu, de pénétrer pour la première fois en Bretagne, en 1363, au siège de Bécherel, en vue de la garnison de Hédé.
Certes, ces canons ne ressemblaient guère à ceux de nos jours, et les pierres qu'ils lançaient n'avaient pas grande action contre les solides murailles sur lesquelles elles venaient se briser, mais contre les hommes sans autre protection que leur armure et leur boucliers, qui se battaient corps à corps, c'était une arme terrible qui les moissonnait sans leur permettre d'approcher. Ils n'avaient rien pu contre les remparts de Bécherel, et leur seule victime avait été le chevalier Bertrand de Beaumont, partisan de Jean de Montfort, au moment où il s'en moquait en niant la sainteté de Charles de Blois. ( Enquête faite pour la canonisation de Charles de Blois en 1371. Dom Morice, Pr Tome II, col 30.) Cependant quelque peu dangereux que fussent encore ces canons, qui, du reste, allaient se perfectionner, ils n'en constituaient pas moins un grave danger pour Hédé, et particulièrement pour le bayle intérieur, où étaient installés le matériel, les écuries, les magasins et qui se trouvaient précisément en face d'un autre coteau de même hauteur, à peine séparé par une distance de cent cinquante mètre, d'où il pouvait être balayé facilement et contre lequel il n'y avait aucun abri. Le péril était grand pour le château qui devenait difficile à défendre et il était prudent d'y pourvoir. Aussi quelque coûteux qu'ils fussent, on n'hésita point à employer les grands moyens et l'on construisit un mur de pierre d'une épaisseur de deux mètres et demi, d'une solidité à toute épreuve, qui partant de l'angle Nord-Ouest de la tour pour y revenir à l'angle Sud-Ouest en suivant d'abord le fossé puis le contour de la pointe, forma une enceinte bien close, agrandit le périmètre de la partie défensive du château et ajouta considérablement à sa force. C'était une nouvelle forteresse presque imprenable ajoutée à l'ancienne, car cette muraille rasant le bord du rocher sans y laisser place pour le pied de l'assaillant, ne montrant aucune ouverture, à qui l'énorme profondeur de la vallée et le ruisseau qui y coulait servaient de fossés, devenait inabordable.

Ce n'était pas tout de se protéger contre l'attaque du coteau voisin, il fallait encore pouvoir y répondre. Un certain nombre de casemates ouvertes à cet effet dans la courtine donnaient une grande facilité pour la surveillance à travers leurs meurtrières et la forme ronde de celles-ci indiquaient qu'elles étaient destiner à laisser passer la bouche d'une couleuvrine. et ce n'était pas une vaine menace, car à la fin des réparations , ces embrasures furent armées de canons. ( Ogée - Dictionnaire de Bretagne -Hédé.) Il serait curieux de connaître quel fut l'armement du château et le nombre de pièces qui y furent envoyées. Sans doute ce nombre fut très restreint, car elles n'abondaient point encore à cette époque, mais malheureusement il ne reste dans les archives aucun document qui puisse nous instruire. Cependant un compte du Trésorier des Guerres, Olivier Baud, quoique plus récent d'environ cinquante ans ( 1461 ), des pièces d'artillerie et munitions accordées à Philippe de Maletroit, Capitaine de Chantocé, pour armer sa citadelle, peut nous donner, par comparaison , une idée de ce que dut être l'armement de Hédé.

Pour la Tuycion dudict château, 2 vollées de canon pesant 95 livres de cuivre ; 2 boestes (culasse mobile destinée à recevoir la charge, et était maintenue par une clavette à la partie inférieure) de serpentines pesant 112 livres de cuivre ; une vollée de serpentine pesant 133 livre de cuivre ; une grosse couleuvrine pesant 115 livres de cuivre ; 4 boestes de canon pesant 160 livres de cuivre ; 300 livres de poudre de canon ; 400 livres de plomb ; 6 petites couleuvrines pesant 140 livres de cuivre ; 2 arbalètes montées ; un millier de trait ferré ; 12 tyolles à 4 poulins (poulies) ; 30 voulges ( Pertuisanes ou piques) ; 30 pavaysmes (de Pavois - bouclier ou volet placé en avant de la couleuvrine pour abriter le canonnier) ; 100 livres de fil pour cordages d'arbalestes ; 2 grandes molles de cuivre (moules) à faire plombetz pour les grandes couleuvrines et quatre petits pour les petites.
( Premier compte d'Olivier Baud, 1461. Dom Morice, Tome II, page 1777.)

 

Combien de temps durèrent les travaux du château ? Sans doute ils furent longs et ne se terminèrent point dans les deux années pendant lesquelles Messire Olivier de Maillechat, nommé après la mort de Jean IV, par Jeanne de Navarre, régente, remplaça Messire Symon d'Espinay à la capitainerie de Hédé, ni même pendant celles qui suivirent, après qu'il eut reçu son investiture du nouveau régent, alors que la duchesse obligée d'abandonner la tutelle de son fils et de quitter la Bretagne par suite de son second mariage avec le roi d'Angleterre, avait dû "relever et quitter" les capitaines qu'elle avait institués, "de leur serment" afin "qu'ils tiennent désormais de Monseigneur le duc de Bourgogne (nommé régent à sa place) ayant la garde et le gouvernement de Monseigneur le duc de Bretagne, ce que ledit Olivier promet de faire,dont il donne son écrit scellé du sceau de Messire Guillaume de Montauban à sa prière le 28 octobre 1402" .

Olivier de Maillechat remplit ses fonctions jusqu'à sa mort, arrivée peu de temps après son installation, et fut remplacé par Messire Pierre de la Mareschée ou Marchée.

( NOTE / Dom Morice, Pr II, page 710 / Olivier fut le dernier représentant, du moins de la branche aînée, d'une famille fort ancienne au pays de Hédé où elle possédait, en Guipel, la terre de Maillechat dont elle portait le nom, et celle du Chesnay, qui fournit de nombreux soldats à la Bretagne. Ses armes étaient d'argent, à la bande de gueules chargées de trois cannes d'or. On trouve Olivier donnant en 1133, aux moines de l'Abbaye de la Vieuxville, une mine de froment qu'il avait reçue de Asculpe de Soligné lors du départ de celui-ci pour Jérusalem. Un autre Olivier, en 1183, est cité dans une enquête faite par Henri II, roi d'Angleterre. Jehan paraît comme témoin en 1167 dans l'enquête faite par Jehan de Soligné au sujet des droits dans les forêts de "Tanoart"et "Borgoth" Tanouarn et Bourgouët contesté aux moines de la Vieuxville par quelques chevaliers. Guillaume est témoin en 1213 dans un second accord avec le prieur de Saint-Florent sous Dol et Raoul Le Tort. Un autre Guillaume accompagne, en 1324, le comte de Richemont. Hercort assiste au XIV ème siècle , à une vente faite par Alain des Préaux à Robert du Plessix. Pendant la guerre de succession nous voyons Luc, compagnon de du Guesclin, à la suite duquel il bat en 1353, les Anglais à Bécherel et, en 1362, ceux de Normandie et qu'il suit dans toutes ses guerres. Guillaume et Berthelot, fils de Luc, peut-être, sont écuyers en 1370 dans la montre de Guillaume Botrel. L'année suivante, le 1er mars 1371 Messire Geoffroy, Chevalier bachelier, paraît dans la montre de du Guesclin, et avec Olivier son frère assiste au siège de Bécherel sous les ordres de Mr Jehan de Beaumanoir et Robert Guitté, maréchaux du connétable, mais en 1379, ils se rallient au duc Jean, contre lles Français et du Guesclin. Ils semblent avoir acquis une situation beaucoup plus importante que leurs prédécesseurs ; tous les deux, en 1379 jurent fidélité au Duc, à vivre et à mourir, envers et contre tous. Messire Geoffroy, chevalier tient à Saint-Lô, le 15 octobre 1374, une montre ou paraissent comme écuyers Olivier, son frère, Guillaume son fils (?) et Berthelot son neveu (?) ; en 1388, il siège parmi les nobles assemblés par le Duc à Nantes pour entendre et jurer ses griefs contre Olivier de Clisson et en 1395 se porte caution pour son frère, Olivier, nommé Capitaine de Jugon ; il dut mourir peu de temps après. Olivier, écuyer en 1378 dans une montre de Pierre de la Houssaye, ratifie en 1381 le second traité de Guérande et en 1383 assiste à la prise de possession de la baronnie de Raiz par le duc Jean IV. Ecuyer, en 1385 en la compagnie de Jean du Hallay, il reçoit en 1395 la capitainerie de Jugon, puis, après la mort du Duc, celle de Hédé. Il ne semble pas qu'Olivier ait eu des enfants, ou du moins des enfants mâles, car, bien qu'il existât encore une branche cadette, représentée en 1513, à la Bouyère en Feins, par n.h. Ruot qui tenait cette terre à bienfait de Guillaume, son frère décèdé, descendant de Jehan, seigneur du Plessix-Turpin en 1427, et qui disparut, sans doute, peu après, la seigneurie de Maillechat est passée vers le milieu du XV ème siècle, entre les mains de Pierre Cesnel, qui l'avait acquise par son mariage avec Jeanne Boutier, fille de Jean, seigneur de Château d'Acy et Jeanne de Saint-Gilles et petite nièce de Jehanne des Vaux qui la possédait en 1427 et lui en avait fait don. Cette Jehanne d'une famille qui à Dingé tenait l'hôtel et manoir des Vaux où elle habitait en 1441 (Domaine ducal de Dingé) qui se fondit dans Le Scuff, et dont les armes portaient ; d'or à trois merlettes de sable, était vraisemblablement l'enfant de N. des Vaux ( Les Montres de Dingé en 1427 manquent ) et d'une fille aînée d'Olivier de Maillechat, soeur de Philippote qui hérita de la terre du Chesnay.)

Celui-ci, originaire de la paroisse de Saulnières, écuyer dans une montre de Jehan Raguenel en 1373, en 1375 dans celle du vicomte de Dinan et en 1380 sous Yon Marquer, ratifie le traité de Guérande le 10 avril 1381 et assiste comme témoin, le 6 août 1406, au testament de la duchesse Jeanne de France. Il figure en 1420 parmi les gens de la duchesse et c'est sans doute son fils Jehan, sieur de la Mareschée, qui devient Maîstre d'hostel du Duc et capitaine de Jugon en 1457, avec qui semble s'être éteinte la famille, et Ermelette, sa fille, qui est dame de la reine de Sicile en 1428. Nous n'avons point la date de son institution de capitaine de Hédé, mais nous savons qu'il remet les clefs du château à son successeur le 11 mai 1404, pour devenir receveur des Régales de Dol. Ses armes étaient d'azur à deux badelaires, ou épées anciennes d'argent, en sautoir.

Ce successeur fut Messire Guyon Turpin. D'une famille d'Anjou, alliée à celle de Laval, c'est sans doute à ce titre qu'il reçut de Guy XII, encore à cette époque curateur du jeune duc, la capitainerie de Hédé. L'acte d'investiture est du 11 mai 1404. Plus tard il suivit, comme écuyer, en Terre-Sainte, son parent Guy XII qui mourut au retour à Rhodes, de la peste le 12 août 1414, et dont il ramena le corps à Laval, au commencement de 1416, il tenta d'en épouser la veuve, Jeanne de Laval, se fiança secrètement avec elle, mais son entreprise ne réussit point ; à la suite de l'opposition de la famille de Jeanne, ces fiançailles furent annulées (Trévédy - Les compagnons de Jeanne d'Arc.) et il ne semble pas avoir pris d'autre alliance. Pendant l'administration de ces trois Capitaines, c'est à dire jusqu'en 1419, rien ne s'est passé qui ait laissé un souvenir.

Après Messire Guyon Turpin apparaît Messire Robert d'Espinay. Son obligation scellée du sceau de Symon d'Espinay, son père et prédécesseur en 1399, et de celui de Jean Jarret, est du 3 novembre 1419. Il jouit de la capitainerie pendant vingt-trois ans jusqu'en 1442 ( Dans son "Histoire généalogique de plusieurs maisons illustres de Bretagne" Du Paz a donné celle des Espinay et de quelques autres qui ont fourni des Capitaines à Hédé. Nous y renvoyons le lecteur. Arch 8)
Malgré les embarras et les soucis de toute sorte qu'il avait eu à subir depuis son avènement au trône ducal, l'emprisonnement que lui avait infligé la vengeance et la haine des Clisson et des Penthièvre, Jean V s'occupait beaucoup de ses sujets et s'efforçait de réparer les désastres survenus sous le règne si troublé de son père. Toujours en route pour les affaires de son duché, le jeune prince est en 1425, à Saumur où le 7 octobre il signe avec le roi de France un traité d'alliance contre leurs ennemis les Penthièvre et les Anglais ; le 12 il rentre à Rennes, où il reste plusieurs jours ; le 28, il est à Montmuran. Il ne semble pas que cette fois il se soit arrêté à Hédé ; il s'est contenté d'apercevoir de ses fenêtres sa bonne forteresse placée bien en vue sur sa pointe de rochers, mais quatre ans plus tard, dans un autre voyage, il reviendra la visiter.
En 1429, nous voyons le duc Jean V à Rennes le 31 mars et le 11 avril à Fougères, d'où il se dirige vers Hédé. C'est là "au chastelet de Hédé" que "le seiziesme jour d'apvril mil quatre cent vingt neuf, il donne une certification" touchant la réformation de la paroisse et ville de Combour "signé Par le duc, de sa main, et plus bas, Huchet." ( Bibliophiles Bretons - Lettres et Mandements de Jean V - Publiés par M. René Blanchart.) Son séjour fut de courte durée, car, le 25, il était à Elven, et à Rennes le 1er mai ; mais si pressé qu'il ait été, il avait eu encore le temps de s'occuper de son château de Hédé et de recevoir une députation des habitants de sa bonne ville venus lui apporter leurs compliments et leurs voeux.
Cette démarche ne fut point inutile, et il en garda bon souvenir ainsi que nous allons le voir.
Au moment où la paix semblait revenue dans le pays, où l'on commencait à respirer, où l'on pouvait espérer vivre avec un peu de tranquillité, un nouveau fléau s'abattit sur Hédé, terrible et imprévu, qui vint y jeter la désolation et réduire ses habitants au désespoir. Un incendie violent, impossible à combattre avec des moyens insuffisants sur ce rocher sans eau, avait réduit en cendre toutes leurs petites maisons, couvertes en chaume ou en bardeaux, serrées les unes contre les autres, proie toute préparée pour la flamme. En un instant une grande partie de la ville disparut. Le désastre était au complet pour les malheureux déjà peu fortunés auparavant, restés sans abri, réduits à la plus affreuse détresse. Dans leur infortune, ils se souvinrent de leur duc qu'on appelait Jean le Sage, qu'ils étaient allés saluer il y avait deux ans à peine, qui avait eu pour eux de bonnes paroles, et lui exposant le triste état dans lesquels ils se trouvaient, la misère profonde où ils étaient tombés, l'impossibilité d'en sortir avec leurs seules forces, ils firent appel à sa générosité.

Aussitôt que Jean V eu connaissance de ce désastre, par mandement du 10 avril 1431, il donna ordre à Auffroy Guynot, son trésorier, de remettre au Capitaine de Hédé, Messire Robert d'Espinay, Grand Maistre d'hostel, " cent livres à départir aux pouvres gens de la ville de Hédé qui avoient ars leurs maisons, pour les aider à les rebastir." ( Dom Morice, Tome II, Col 1232.) Sans chercher à comparer la valeur de l'argent au XV ème siècle avec celle qu'il a de nos jours, nous savons qu'à cette époque cents livres étaient une somme considérable. Mais quelque qu'important que fût ce secours, il était bien insuffisant, c'était une goutte d'eau dans le gouffre profond de cet effondrement. A part les personnages appartenant à la Sénéchaussée qui pouvaient être riches, tous les autres, dans une petite ville sans commerce et sans industrie, avaient bien de la peine à vivre de leur travail ; ils se voyaient sans aucune ressource pour relever leur maisons, et, perdant toute énergie devant leur habitation en cendres, préféraient les abandonner et s'en aller au loin tenter un sort plus favorable. La sollicitude de Jean V pour les sinistrés, en présence de cette triste situation, ne s'arrêta pas à ce don de cents livres. Voyant les habitants, déjà bien peu nombreux, s'expatrier, leur impuissance contre la gravité de la catastrophe, les rues devenir désertes, la ville inhabitée, il revint à leur aide. Le 6 octobre 1432, pour remonter leur courage, les engager à se rattacher au pays et d'autre part, pour leur permettre de trouver chez eux les ressources nécessaires à la vie matérielle, pain, viande, etc., que la ville, sans banlieue, ne pouvaient leur fournir elle-même, par lettres patentes datées de son château de l'Hermine, il ordonne que les marchands de la châtellenie qui portent leurs denrées à vendre à " Montfort, Rommillé, Bécherel, Tinténiac, Combour, Aubigné," seront "tenus et contraincts, sous peine de grosses amendes" de les porter aussi au marchés de Hédé : " qui est en partie froste et inhabitée" et dont "les demourans pauvres et non puissants de biens sont en propos d'aller demeurer es aultres lieux voisins .... et doibvent aller quérir leurs bledz, drapz, chairs et aultres choses nécessaires " qu'on n'apporte point à leur marchés. En revanche les marchands qui viendront et leurs marchandises seront francs et quictes de tous debvoirs accoutumés, cohuaiges et autre subventions quelconques.

Ce ne fut pas tout encore. Trois ans après, en 1436, nous retrouvons le duc à Montmuran. On voit qu'il y vient souvent ; c'est qu'il est en famille; Les possesseurs, les riches et puissants seigneurs de Laval étaient des parents et des amis, et il y retrouvait Isabeau, sa fille, qu'il avait donné en mariage à l'héritier de la maison, Guy XIV.
Pendant le temps qu'il demeura au château voisin, fit-il une chevauchée vers Hédé, cela est probable, mais on ne nous en dit rien. Quoi qu'il en soit, s'il ne vint pas les voir, les habitants de sa bonne ville ne manquèrent pas d'aller se présenter à lui et, tout en lui offrant leurs hommages et leur remerciements, protestant de leur dévouement et de leur fidelité, de lui exposer leurs doléances et leurs griefs. Ils n'en manquaient point, mais il y en avait un, particulièrement, qui était tout récent au sujet d'un impôt nouveau, contre lequel ils voulaient protester.

Dès le temps de Jean IV, à la fin du IV ème siècle, ainsi que nous l'avons dit, ils avaient obtenu des lettres patentes qui les avaient franchis, quittés et exemptés de tous fouaiges, subsides, guetz et autres subventions, lettres renouvelées en 1404, le 7 janvier (n. st. 1405) par le duc Jean V lui-même, qui était huit jours après, le 14, à Montmuran, où il passa plus d'une semaine chez son oncle et ancien curateur, Guy XII de Laval, et deux ans plus tard, en 1407. Cependant, lorsqu'en cette année 1434, le duc avait dû lever un nouvel impôt de 20 sous par pipe de vin vendu en détail, ses Receveurs, sans se préoccuper de leurs franchises avait imposé les habitants de Hédé comme les autres, et depuis la fête de la Toussaint précédente, c'est à dire depuis quatre mois, les forçaient à payer ce droit.
Jean, reconnaissant la justice de leur réclamation, s'empressa d'y faire droit, et, sans attendre davantage, dès le jour même où ils déposèrent leurs plaintes disant :

" affin que nostre dicte ville puisse estre habitée et fréquentée . . . avons franchy, quicté et exempté, quictons, franchisons et exemptons . . . nos dictz subiectz . . . , et voullons mesme que dudict impost de vingt soubz par pippe de vin qui ont esté venduz puix la feste de Toussaintz deraine en detail en nosd. ville et forsbours de Hédé et que au temps à venir le feront, nosdictz subiectz en soint francs et quictes . . . Sy donnons en mendement a nostz Capitaine, Sennechal, Alloué et Procureur de Hédé . . . , que de nostre presante quictance, franchise et exemption, ils facent . . . plainement et paisiblement jouir et user nosdictz subiectz . . . "

Et il ajoute, pour bien montrer son bon vouloir aux plaignants, la confiance qu'il a en eux, et de leur donner la plus complète satisfaction, cette clause de grande importance qui figurait déjà dans ses lettres du 10 juin 1407, qu'en cas de contestation :

" Relation de trois ou quatre des plus authentiques bourgeois dudict lieu d'en avoir jouy ( de ces franchises ) vauldront de ce garant et descharge . . . Donné au chastel de Montmuran, le vingt deuxiesme jour du mois de feburier, mil quatre centz trante et cinq (1436 n. st.) "
L'acte est signé "Par le duc" et plus bas est escript ce qui ensuilt " Par le duc, de son commandement, l'abbé de Beaulieu, le Grand Maistre d'hostel, messire Jean de Quermelle et autres plusieurs presens signes."

Cette affaire terminée, le duc parti eut d'autres soucis bien plus graves et se rappelant tout ce que, pendant la durée de son règne, il avait eu à souffrir des survivants irréconciliables du parti de Blois, son emprisonnement par les Clisson, une tentative récente d'empoisonnement, des trahisons continuelles qui se tramaient autour de lui, il chercha à épargner ces malheurs à ses enfants et faisant appel à sa Noblesse, lui demanda de venir, par un acte solennel, témoigner de son dévouement et de sa fidelité à son Souverain. Des commissaires furent délégués, en 1437, dans chaque évêché, pour recevoir le serment. Tous les nobles de la Chatellenie de Hédé se présentèrent dans ceux de Rennes, Saint-Malo et Dol, sur la limite desquels le château se dressait et où s'étendait son ressort. Nous ne citerons point ici tous leurs noms qui seraient trop nombreux, mais qu'on trouvera aux archives du château de Nantes ( E.144, 145, 146.), avec les originaux des actes signés de leurs nom ou scellés de leurs sceau, ou de la copie donnée aux Preuves de l'histoire de Bretagne par Dom Morice II col 1301 et suiv.

Il est curieux de connaître la formule du serment. On jurait à Dieu

"d'estre bons, droits et léaux au duc, envers et contre toute personne qui se voudrait avancer à attenter contre lui et son duché ; et après lui ses enfants masles et aux enfants masles d'iceux qui succederoient au duché, ou par deffaut d'eux à Nosseigneurs de Richemont et d'Estampes et à leur descendants masles respectivement; de découvrir et révéler au véritable héritier tout ce qu'on sauroit qui auroit été entrepris contre son service. Et s'il avenoit que celui qui auroit été proche héritier voulut avancer son droit en faisant mourir le Duc, qu'on aiderait à le débouter comme indigne de la seigneurie du Duché et qu'on seroit aidant au plus proche après lui, pour lui faire obtenir le duché."

On voit combien étaient graves les motifs de crainte, puisqu'on allait jusqu'à prévoir le cas où le plus proche héritier du duc attenterait à sa vie.

Jean V mourut en 1442, le 28 août. François Ier, son fils, qui lui succéda, montra à l'égard des gens de Hédé la même bienveillance que son père. Ceux-ci craignant peut-être qu'il oubliât les franchises et libertés qui leur avaient été accordées, lui demandèrent de vouloir bien les reconnaître et les confirmer. Le duc répondit par des lettres en date du 23 mai 1445 données au château de Kerango ( Paroisse de Plescop - Evêché de Vannes ) en présence des évêques de Dol et Saint-Malo, du Grand Maistre d'hostel le sieur de Montauban, MM Jehan Labbé, le Sénéchal et le Chantre de Rennes ( Robert de la Rivière ?) et autres, où il est dit :

" receu avons la supplycation . . . de notz subgez les . . . habitans de nostre ville de Hédé exposans que notz prédécesseurs ducs et prince de Bretaigne leur ont . . . concédé plusieurs franchises et libertez tant de foiges, tailles, impostz, debvoirs, dons, aydes que aultres subcides quelzconques, desquelles franchises ils ont jouy au temps passé . . . nous requèrent qu'il nous playse sur ce leur pouvoir de nostre grâce . . . voulons . . . à nos dictz subiectz qu'ilz . . . jouissent . . . de leurs grâces, libertez et franchises . . . " il ajoute : ". . . commandons expressément à nos trésoriers . . lesser les dictz supplians jouyr . . . plainement . . . sans sur ce . . . ne souffrir estre mins . . . empeschement. "

Dix mois plus tard, le 23 mars 1445 (1446 n. st.) de nouvelles lettres exactement semblables signées au Pin ( Canton de Saint Mars la Jaille - Loire-Inférieure ) viennent appuyer celles-ci et manifester une fois de plus la volonté du prince.
Donc, l'ordre est précis et les habitants de Hédé peuvent se croire d'autant plus tranquilles, que le 14 juillet suivant, il est transmis par le trésorier Hervé Maydo aux fermiers et sous-fermiers de l'impôt de l'évêché de Rennes, mais le duc est loin, ses receveurs qui ont besoin d'argent ne tiennent point compte de ses ordres et, lorsque de nouveaux impôts viendront à être ordonnés, ils seront répartis sur les exemptés comme sur les autres. C'est ce qui arriva peu de temps après. Robin Cartier, le receveur des fouages, avait cependant obéi aux lettres ducales ; il n'avait rien demandé à Hédé, mais lorsqu'à la fin de l'année il se présenta à la Chambre des Comptes, Messieurs de la Chambre n'admirent ni franchises, ni exemptions, et exigèrent de lui qu'il versât toute la somme imposée. Il lui fallut donc, bon gré mal gré, revenir vers les habitants de Hédé et leur réclamer la somme dont on le rendait responsable. Ceux-ci, peu disposés à subir ces exigences, protestèrent vivement et François II ayant pris connaissance de leur plainte répondit aussitôt :

" receu avons . . . la requeste . . . des paouveres subiectz . . . demurans en nostre ville de Hédé " se réclamant de leurs franchises nonobstant lesquelles " iceulx supplians ont esté en certaines aydes par nous ordonnéez imposez, scavoir : en juillet mil quattre centz quarante et quattre, dix réaulx ; en une autre ayde précédente, dix réaulx et, en septembre mil quattre centz quarante et cinq, quinze réaulx, qui se montent trante et cinq réaulx " lesquels "veult Robin Cartier . . . contraindre les dicts supplians a luy ferre payement . . . tant par exécution de biens et détemption de corps que aultrement . . . ce que ne pouroinct ferre obstant les grandez charges que ont eus et soubsteneus le temps passé par le faict des guerres et si à ce estoinct contrains attendu la dicte somme et le nombre des dictz habitans, leur conviendroict à partyre d'eulx de lesser la dicte ville . . . Mandons à nos trésoriers . . . des dictes aydes . . . et par especial audict Robin Cartier, lesser lesdictz habitans jouyr . . . paisiblement de leursdictes franchises . . . et se auchuns de leur bien étoinct à cause de ce prins ou executez . . . audict Cartyer ou aultres qui en ont faict l'execution et qui les détiennent, iceulx rendre et restituer ausdictz supplyans sans reffus ne delay . . . car ainsi nous plaist."
Cliczon le vingt septiesme jour de janvier l'an mil quattre centz quarante seix ( 1447 n. st.)

Nous supposons que cette fois, Messieurs de la Chambre des Comptes se montrèrent moins exigeants et que les plaignants obtinrent gain de cause.
Avec le décès du souverain à qui ils avaient fait serment cessaient les pouvoirs des capitaines qu'il avait institués pour la garde de ses villes et que son successeur nommait à son tour. Après la mort de Jean V, le duc François redonna la capitainerie à Messire Pierre de la Marzelière, chevalier, son Chambellan et son Conseiller, grand personnage à la Cour, qui la tenait après Messire Robert d'Espinay qu'il avait remplacé nous ne savons à quelle époque.

( Cf Du Paz, qui a fait la généalogie des seigneurs de la Marzelière. cependant nous devons dire avec Du Paz " que la maison de la Marzelière est des anciennes et illustres maisons de la province de Bretagne, les seigneurs de laquelle ont toujours été employés aux plus grande affaires, charges et honneur par les Ducs et Princes du pays, comme Chambellans et Capitaines des villes, châteaux et forteresses du pays." Ajoutons que si la terre et le manoir dont il portait le nom se trouvaient dans la paroisse de Bain, Pierre tenait aussi à la chatellenie de Hédé par sa terre de la Touche-Huet, en Gévezé et la Mézière du chef de sa femme Anette du Boishamon, qui l'avait eu en douaire de son premier mari, Jean de Beaumanoir, vicomte du Besso. Pierre de la Marzelière n'eût que deux enfants : Jean, mort jeune, et demoiselle Plessou, mariée à Messire Olivier Giffart.)

Nous avons de lui un document qui présente pour nous un grand intérêt ; c'est un état de la garnison qui occupait le château sous son commandement, avec le nom de ceux qui la composaient :

Voici ce document tel que nous le montre Dom Morice (Pr de l'histoire de la Bretagne Tome II - col 1514) :

" Montre du nombre de Gend'armes et de trait à la charge de Messire Pierre de la Marzelière estans au château de Hédé en garnison pour la tuicion et garde dudit lieu veue et receue le 6 jour de novembre 1449 par Jehan, sire de Montauban et de Landal, maréchal de Bretagne."

 

Hommes d'Armes.

Guillaume Piedevache de Langoët.
Bertrand Piedevache.
Jehan de Saint-Gilles.
Jehan Robert.

Archiers.

Jehan de la Barre.
Guillaume Piedevache.
Jehan Le Roux.
Guillaume du Breuil.
Jehan Le Comte.
Rolland de la Roussaye.
Geoffroy Piedevache.
Guillaume de la Hingueraye.
Geoffroy de Hirel.
Jeahn du Rocher.

 

On voit ici que tous les hommes qui composent la garnison sauf deux, peut-être; Jehan de la Barre et Jehan du Rocher qui viennent nous ne savons d'où, appartiennent à des familles nobles, relevant de la Châtellenie. Ils étaient peu nombreux, quatorze seulement pour défendre la place, mais ce n'était sans doute que pendant la paix, et pendant les temps de guerre, il devait y avoir l'aide des habitants de la ville combattant sous leurs ordres. On sait, en effet, que Jean V fut le premier duc qui s'occupa de l'armement des populations, particulièrement des campagnes. Par ordonnance du 20 mars 1425 ( 1426 n. st.) " chaque paroisse, dit M Levot ( Biographie bretonne de Jean V ) avait une sorte de milice mobilisable, établie proportionnellement à la population, à peu près sur la même base que la conscription moderne. Chaque homme devait avoir un arc, une hache, suivant son aptitude, un fort bouclier de bois de tremble et autres armes diverses ; il devait porter un fallot pour les marches de nuit."

Les travaux entrepris en 1399, par Jean IV, pour réparer le château, n'avaient pas été suffisants, paraît-il, ou peut-être l'avait-on négligé, car ses deux successeurs durent s'en occuper sérieusement à leur tour et, de 1443 à 1450, on en faisait encore qu'on poussait activement pour "haster l'oeuvre et fortiffication encommencée de Hédé." Ces travaux étaient payés par la levée d'un fouage sur dix paroisses des environs. ( Bretagne contemporaine.)

Pierre II qui succède à son frère, le 17 juillet 1450, continue à Pierre de la Marzelière la confiance que celui-ci lui avait accordée et le 22 juillet :

" testifie que ses pères et frères instituèrent son bien aymé et féal Chevalier et Chambellan, Messire Pierre de la Marzelière, capitaine et garde du chastel et forteresse de Hédé . . . et, à cause qu'il estoit bien et deuement porté, en reconnaissance de ce et des bons et loyaux services à ses dits seigneurs père et frère et en espérance qu'il luy en feroit au temps advenir, il l'institue et ordonne Capitaine et garde dudict Chastel de Hédé, ô pouvoir de commettre officiers, tant à la jurisdiction et à la récepte qu'à la garde du chasteau, tout ainsi qu'il faisait du vivant de ses pères et frère."

( Du Paz, Histoire de plusieurs maisons illustres de Bretagne. page 678.)

En outre de la Capitainerie, il lui avait été accordé une rente de 100 livres à prendre sur la recette de Hédé.

" Voulons, dit le mandement, et octroyons par ces présentes audit Chevalier, que de l'office de Capitaine de Hédé et des cent livres de pension qu'il prend en outre et a accoutumé de prendre sur la recette dudit lieu, que lui et son héritier principal les tiennent et possèdent sans que Nous et nos successeurs les en puissent désapointer jusques à tout premier leur estre faite l'assiette desdits 200 livres de rentes ou bailler finance de quoi les acquérir. Donné à Vannes 31 juin 1451." ( Dom Morice, Pr II, col 1595.)

Pour en finir avec Pierre de la Marzelière, disons que pendant le règne du Comte de Richemont, Connétable de France, successeur, sous le nom d'Arthur III, de son neveu Pierre, qui ne porta la couronne ducale que seize mois, et mourut à son tour le 26 décembre 1458, il reçut, le 13 octobre 1457, une nouvelle investiture avec celle des Rachats de Bretagne, et enfin resta Capitaine de Hédé sous François II, jusqu'à sa mort en 1462.
Lorsque François II devint à son tour duc de Bretagne, il trouva en face de lui, dans le roi de France, Louis XI, un ennemi terrible convoitant ardemment la Bretagne. Il crut nécessaire de prendre, vis-à-vis de cet adversaire de peu de scrupules, quelques précautions, pensa à mettre en bon état les forteresses de sa frontière et jugea utile de renforcer les fortifications de Hédé.
En 1464, il demanda à Pierre Robert, seigneur de Saint-Gondran, de faire entourer de murs la ville de Hédé et de la faire fortifier. ( Archives de la Loire-Inférieure, B.1165 )

Que voulait dire le duc en ordonnant de faire fortifier la ville, et quel fut le résultat de cet ordre ? Si l'on entendait par là lui construire une ceinture de murailles comme on avait fait au château soixante ans auparavant, c'était beaucoup demander, et l'on ne fit rien. Peut-être entendait-on seulement l'entourer d'un fossé formant un premier obstacle devant une attaque imprévue ? Mais ces fossé existait déjà depuis longtemps, sans eau, il est vrai, mais larges et profonds, partant de l'escarpement nord dominant la route de Dol, au baillage des Guibarets, entre la Motte-Jouhan et le Prieuré, pour aller, en faisant un circuit assez long, se rattacher au château. Ils renfermaient dans leur parcours la ville avec son église, son Auditoire, ses halles ..., etc., la séparant complètement des autres habitations bâties en dehors d'eux. Et cela est si vrai que, quoique nous ne connaissions pas de façon certaine l'époque à laquelle furent creusés ces fossés, dont une partie existait à la fin du XVII ème siècle et afféagés au XVII ème a laissé des traces encore reconnaissables, mais qu'on peut croire contemporains de ceux du château lui même, nous trouvons dans les lettres de Jean V, en 1407, la distinction entre la ville et ses faubourgs qui sont aujourd'hui restés les mêmes qu'autrefois.
Peut-être pourrait on dire que ces fortifications nouvelles aurait consisté en l'établissement de portes sur les chemins amenant à Hédé, à l'endroit où ils rencontraient les fossés. Dans un rentier du domaine royal du XVIII ème siècle, on trouve en effet "le chemin à portes de Tinténiac...., la porte Combourgeoise, sur le chemin qui mène à Combourg (route de Dol)" ; mais ces noms indiquent tous simplement, selon nous, un passage, un simple pont au-dessus des douves accosté de forts talus, qu'on pouvait détruire au besoin en cas de danger, et nous ne croyons point qu'il ait existé de portes fortifiées, ou même un ouvrage en pierres quelconque.
Il est probable que si il y a eu comme il était dit, des travaux exécutés pour la protection de la ville, cela s'est borné à un simple élargissement, et un nouveau creusage des fossés, plus ou moins comblés, avec rejettement de terre pour former un parapet et en augmenter ainsi la profondeur et la puissance défensive.
Vingt ans plus tard, en 1484, le duc François II, déjà âgé de cinquante ans, fatigué des luttes qu'il avait à soutenir contre la France, effrayé de la trahison de sa noblesse qui osait l'attaquer à main armée jusque dans son palais pour lui arracher son Trésor Landais, sans enfants mâles pour lui succéder, n'ayant que des filles et voyant les intrigues qui se formaient déjà autour d'elles, quoiqu'elles ne fussent encore que des enfants, entre prétendants avides de s'emparer de la Bretagne, chercha pour Anne et Ysabeau un appui et une protection que, prévoyant sa fin prochaine, il sentait ne plus pouvoir leur offrir contre un avenir qu'il voyait sombre et menaçant. Ce ne fut plus, comme Jean V son oncle, seulement à sa noblesse sur laquelle il n'osait compter qu'il s'adressa, mais partout où il espérait trouver des fidèles, aux Etats de la province et aux gens de ses bonnes villes, aux bourgeois restés profondément bretons, aux Sénéchaux, Alloués et Prévosts de ses juridictions qu'il appela à venir jurer :

"vous jurez et promettez par les foy et serment de vostre corps que après le deceix du Duc nostre souverain Seigneur, ou cas qu'il décede sans hoir masle procréé de sa chair en loyal mariage ou que icelle lignée masle defauldroit, vous servirez justement et loyaument vers et contre tous ceulx qui peuvent vivre et mourir la Duchesse, nostre souveraine Dame, mes très redoubtés Dames, Dame nne, fille aisnée du Duc et sa lignée en premier lieu et en second lieu Madame Isabeau et sa lignée et à ceux à qui elles seront mariées et les advouerez et tendrez tout le temps de voz vies pour voz souverains seigneurs et Dames successivement et respectivement ; leur aiderez à vostre pouvoir à tenir, posséder et jouir paisiblement et entièrement de ceste Principauté de Bretaigne, tant en chief que en membres et à en garder les droiz, prééminence et libertez ; et durant la minorité de mesdites Dames (paravant qu'elles soient mariées) obeirez et servirez la Duchesse, comme leur tutrice et garde ; et ainsi le promettez et jurez au précieux corps de nostre benoist Saulveur et Rédempteur Jesus-Christ icy présent sacramentellement sur la Vroye Croix et sur les saintes Evangilles de Dieu et aultres saintes reliques cy estante ; dites : Amen."
( Dom Morice, Tome III, col 461 et 500 )

Le Sénéchal de Hédé fut appelé comme les autres à faire acte de fidelité et à répondre pour les habitants. Quel était-il ? Nous serions heureux de connaître son nom, malheureusement, notre liste de Sénéchaux avant la fin du XVI ème siècle est bien incomplète.

À partir de cette époque et jusqu'à la mort de François II en 1488, nous n'avons plus qu'a relever les noms des quelques Capitaines à qui fut confié le château.
Après Pierre de la Marzelière, il y a une lacune de neuf ans, à moins qu'on y place Tanguy, seigneur d'Avaugour, bâtard de Bretagne, fils naturel de Jean V. Nous n'avons point l'acte d'investiture, mais nous savons qu'il était seigneur de Hédé, et, si nous pensons qu'il eût aussi la capitainerie, c'est que sa veuve, dame Jeanne Turpin, nièce de de Guyon que nous avons vu de 1404 à 1419, remet après la mort de son mari à Olivier Giffart, alors capitaine, un document aujourd'hui perdu, qu'il ne pouvait avoir dressé qu'à ce titre et qui aurait eu pour Hédé un haut intérêt, à savoir l'inventaire de l'artillerie et des armes qui formaient l'armement du Château.

Ce fut un autre bâtard, Edouard, fils naturel de Gilles de Bretagne à qui le duc François II, son oncle, donna vers 1471, pour son état, la Seigneurie et Capitainerie de Hédé. En 1475, il reçoit le commandement de deux vaisseaux, la Grande Nef et la Marguerite montés par 460 hommes, pour une expédition que François II dirigeait contre le port de Fanwick, en Angleterre, mais qui n'eût pas lieu. En 1477, il est chargé avec le sire de Rieux et Charles du Parc de tenir les Montres de l'évêché de Rennes et, en 1482, commande une compagnie de vingt archers de la seconde garde du corps du Duc. Il eût une fin malheureuse, il fut mis à mort par ordre du Trésorier Landais que l'on accusa de l'avoir fait décapiter pour le seul motif de haine et de vengeance. Il avait gardé la seigneurie de Hédé jusqu'à sa mort, mais la capitainerie lui avait été reprise en 1474, par Messire Olivier Giffard, gendre de Pierre de la Marzelière, dont il avait épousé la fille Plésou.

A partir de ce moment, les capitaines de Hédé se succèdent rapidement. En 1475, Monsieur Pol de Courcy, dans son Nobilaire de Bretagne,donne ce titre à un Jean Taupin ou Toupin d'une famille noble des évêchés de Tréguier et de Cornouailles, aujourd'hui éteinte, qui portait ; varié d'argent et de gueules. Nous ne savons où il a pris ce renseignement, mais nous sommes portés à croire que ce personnage ne possédait point la capitainerie, et n'était qu'un officier en second, commandant la garnison sous les ordres d'Olivier Giffard.

L'année suivante, ce fut Messire Noël de Texüe, chevalier, qui prête serment le 21 octobre, donnant pour plèges Messire Bertrand de Mareil, chevalier, et Jehan de Coëtdor, écuyer, seigneur de l'Abbaye. Il garda les fonctions pendant trois ans pour les céder, le 27 octobre 1479, à messire Geoffroy de Langan et les reprendre plus tard. Nous l'y retrouvons en 1487 et 1488 ; c'est le dernier qui ait laissé son nom.

Quoique Du Paz nous ait donné la filiation et l'histoire des Textüe, " fort noble et ancienne maison en laquelle il y a eu plusieurs nobles et vaillants chevaliers ", comme cette famille était du ressort de la Châtellenie de Hédé, les terres dont elle tirait son nom étaient situées en la paroisse de Gévezé, et que toute ses alliances étaient prises dans le pays, nous voulons dire un mot de notre Capitaine, et aussi de Geoffroy de Langan.

Messire Noël de Textë, ou Tissue, paraît en 1457 homme d'armes du sire de Malestroit, maréchal de Bretagne. En 1471 et 1474, nous le trouvons lieutenant sous les ordres de messire Bertrand du Parc, puis il devient Chambellan, et, en 1477 avec le sire de Châteauneuf et Jehan de Romillé, est délégué pour la tenue des Montres de l'évêché de Dol. Nous ignorons le nom de sa femme, mais il eût au moins trois enfants : Gilles, mort capitaine de Brest, sans héritiers ; Jean, religieux de Bonne -Nouvelle de Rennes, et une fille, Jehanne, qui recueillit l'héritage de la branche aînée, porté plus tard dans la maisons des seigneurs de Bazouges par le mariage de Jehanne de la Ferrière, sa fille, d'elle et de Jehan de la Ferrière, avec messire Jehan de Bintin. Il mourut sans doute peu de temps avant son maître, car nous ne le voyons point figurer au beguin du Duc.

Geoffroy de Langan appartenait à une très ancienne famille qui tirait son nom de la paroisse de Langan et relevait de la Châtellenie de Hédé. Il était fils cadet, sans doute, de Simon et d'Isabeau Février, mais ne semble point avoir eu d'alliance. Nous ne savons de lui que ce que nous en trouvons dans les Preuves de Dom Morice. Le 14 janvier 1464 (1465), il figure parmi les hommes d'armes de la compagnie de M. de Lohéac, puis se rapproche de la personne de François II, et en 1471, nous le trouvons une des trente et une lances de la garde, puis en 1480 un de ceux qui servent continuellement, nous dit Pierre Landais, en la maison du Duc, ce qui ne l'empêche pas d'être un des des quatre commandants de la petite garde du corps, puisqu'en 1482, il touche 25 livres de solde par mois comme homme d'armes de la garde et comme Capitaine des archers de la seconde garde. Il vit encore au décès de François II, et reçoit pour le deuil 5 aulnes de noir à 12 livres 50 sous l'aulne.

 

La Duchesse Anne de Bretagne d'apès une
peinture anonyme - Musée Dobrée Nantes.

 

 

L'année 1488 dans laquelle allait mourir François II, avait été marquée par l'entrée en Bretagne des Français qui détruisirent à Saint-Aubin-du-Cormier l'armée bretonne. Même après le traité de paix signé par le duc et plus tard après son décès, le roi de France n'en continua pas moins, dans l'intention de s'emparer de la jeune duchesse et avec elle de la Bretagne, à poursuivre ses projets d'invasion.

Ses soldats occupaient tout le pays aux environs de Rennes, ville fidèle héritière du duché et presque son dernier refuge, qu'ils cherchaient à isoler en s'emparant de toutes les forteresses qui l'entouraient, et à prendre par la famine en empêchant les vivres d'y arriver. Occupèrent-ils le château de Hédé ? Cela est probable et semble résulter de la plainte suivante adressée en juillet 1491, par l'abbesse de Saint-Georges, Françoise d'Espinay, à Anne devenue reine de France :

" remonstre votre orateure . . . singulièrement ès parties de Tinténiac qui est la pluspart de son revenu . . . et qui est fondé en dixmes de blez, tel an des dits quatre ans a esté que elle ne na eu un seul bouexeau de blé, et fut en l'an 1488. Du parsur des autres troys ans, par aucuns dicelx elle na trouvé ung seul home qui voulseist en prendre un seul traict ; et s'ilz en prenoient, a convenu à vostre dicte orateure leur en faire rabat aucunes foiz du tout, et autres foiz de deux pars ; et par aucunes fois les F rançois ont contrainct les ditz dixmeurs à les leur poier et charaiez à Dinan. Et sousventes foiz ont trouvé et rencontré les charectes que les dites dixmes conduisoint a les leurs menez jucques au dit lieu de Dinan ; et, oultre les ditz blez perduz, perdoint leurs chevaulx et charectes ; et dabundance, par chacun des dits ans, ont les dits Francoys fait crier à ban à Dinan, au dit lieu de Tinténiac, Hédé, due il estoit prohibé et deffendu par le roy à tous les subgetz demouranz es dites parties de Tinténiac, Hédé, Montmuron, Bescherel, Combour et autres pays circon vaisinbs dicelx lieux, de non portez blez de dismes ne autres vivres à Rennes, à la peine de la hart et de la perdicion de tous leurs biens." ( Cartulaire de l'Abbaye de St Georges - Sté Archéologique d'Ille et Vilaine - Tome X - page 183.)

 

SUITE . . .